D’abord apprenti chez le peintre de vitraux Émile Hirsch, Georges Rouault suit les cours du soir de l’École nationale supérieure des arts décoratifs à Paris. Employé par le même Hirsch de 1887 à 1891, il est admis aux Beaux-Arts de Paris dans l’atelier de Jules-Élie Delaunay et, à la mort de ce dernier, entre dans l’atelier de Gustave Moreau où il côtoie Matisse, Marquet, Manguin, Huyot et Léon Lehmann auquel il restera très lié. Il participe à deux reprises, sans succès au concours du prix de Rome mais obtient le prix Chenavard en 1894 et le prix Fortin d’Ivry en 1895.
Nommé en 1898 conservateur du Musée Gustave-Moreau, à Paris, il fait en 1901 la connaissance de Huysmans, et fonde en 1903 avec Matisse et Marquet, le Salon d’automne.
Georges Rouault aborde des thèmes liés à une observation critique de la société : juges, avocats, salles d’audience, miséreux, émigrés, fugitifs, sont autant le reflet d’une révolte face à la misère humaine qu’un prétexte à des recherches sur les formes et les couleurs.
En 1917 Rouault se lance dans sa grande aventure gravé autour du personnage d’Ubu (œuvre qui sera exposée en 1938 au Museum of Modern Art de New York). C’est l’époque de notre dessin, qui évoque le mythe du Père Ubu, forgé par l’écrivain Alfred Jarry et célébré par le galeriste Ambroise Vollard. Figure de l’absurdité des hiérarchies politiques, ce personnage sera un thème majeur de la peinture de la fin des années 1910 au début des années 1930, notamment traité par les dadaïstes et les surréalistes Ernst, Miró, Matta… Rouault illustrera d’ailleurs un ouvrage intitulé « Les réincarnations du Père Ubu » en 1925.
Reconnus par les collectionneurs et les marchands pour leur grande force, les travaux de Rouault connaissent le succès dès les années 1910. Maurice Girardin lui achète plusieurs œuvres et, en 1917, Ambroise Vollard acquiert l’ensemble des toiles de son atelier, soit 770 œuvres. Cette acquisition causera un procès en 1946 avec les héritiers de Vollard. Le tribunal reconnaissant à Rouault la propriété de ses œuvres, l’artiste brûlera 315 de ses tableaux en 1948 en présence d’un huissier. Renonçant à la peinture en 1957, il s’éteint un an plus tard et le gouvernement lui offre des obsèques nationales à Saint-Germain-des-Prés. Sa famille conserve son dernier atelier, rue Émile Gilbert à Paris (il s’agit aujourd’hui du siège de la Fondation Georges Rouault), et en 1963, procède à une donation de ses œuvres à l’État.